P.B. Fabritchnyi et K.V. Pokholok - Spectrometrie mossbauer et son application a la caracterisation des materiaux (797054), страница 26
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Cela traduit le faible impact du mode de distribution cationique aussibien sur l’énergie d’interaction coulombienne (énergie de Madelung) que surl’énergie de répulsion de Born (associée au recouvrement partiel des couchesélectroniques des atomes voisins). Pour les systèmes complexes le pronosticthéorique d’une distribution cationique particulière peut s’avérer une tâchedifficile. Le problème est partiellement dû au fait que les éléments de transitionsont susceptibles de changer aisément leur degré d’oxydation. Par ailleurs, dans lesspinelles le mode de distribution cationique dépend beaucoup de la température etdes conditions concrètes de synthèse des échantillons.
Or les coefficientsatomiques de diffusion des rayons X ne diffèrent généralement pas de façonsuffisante pour permettre une détermination fiable de la distribution de cationsdans les sous-réseaux. Dans la grande majorité des cas, l’application destechniques de caractérisation indirectes fondées sur la mesure des propriétés108magnétiques ou électriques ne permet pas d’établir le mode de distributioncationique. Toutefois, si l’on arrive à le déterminer, l’état de valence des cationspeut être mis en évidence à l’aide de techniques de caractérisation indirectes. Dansle cas des ferrites la spectrométrie Mössbauer de 57Fe constitue une technique decaractérisation aussi bien de l’état de valence des cations que de leur mode dedistribution dans les sous-réseaux. Les spectres de 57Fe montrés sur la fig.
58illustrent la fiabilité de reconnaisance du fer divalent et du fer trivalent dans le casde deux composés à structure spinelle pris à titre d’exemples.Fig. 58. Spectres Mössbauer de deux phases spinelles à T > TC . Au sein deZnFe2O4 les ions Fe3+ occupent les sites octaédriques tandis que dans FeAl2O4 lesions Fe2+ se trouvent dans les sites tétraédriques.Les paramètres spectraux (H,δ et Δ) des cations Fe3+ dans les sites A et B sedistinguent suffisamment pour mettre en évidence le mode de localisation de cescations dans le composé étudié.
A partir de la distribution des cations Fe3+ établie ildevient possible, en admettant pour le spinelle la formule AB2O4, de préciser ladistribution dans les sous-réseaux d’un autre cation constituant « non résonnant ».L’avantage des spinelles ferrimagnétiques réside dans le fait que les mesuresMössbauer effectués avec un échantillon placé dans le champ magnétiquepermettent d’améliorer la résolution spectrale des composantes individuelles (cf.Conférence 8).109Si un nouveau cation est introduit dans la structure de type spinelle, sa présencedans un des sous-réseaux diminuera la contribution spectrale des cations de ferconcernés. Il va de soi que le même effet sera observé dans tout autre composécomportant plusieurs sous-réseaux cationiques. En tant qu’exemple, on peutévoquer une structure brownmillerite, Ca2FeAlO5 (Fig.
59), composé qui peut êtreconsidéré comme une perovskite déficitaire en oxygène (cf. Fig. 44).- Fe3+- O2- lacune d’oxygèneFig. 59. Un fragment de la structure de SrFeO2,5 (structure de typebrownmillerite).Les changements observés sont illustrés sur la fig. 60 [56]. L’identification du siteoccupé par un substituant permet de caractériser ensuite son impact sur lesparamètres d’interactions hyperfines des cations de fer, ses voisins. Lors de tellesétudes il est devient particulièrement important d’atteindre la résolution spectralemaximale des sextuplets de 57Fe associés aux sous-réseaux A et B.Application de la spectrométrie Mössbauer à l’étude des atomes de fer auxdegrés d’oxydation supérieurs6Les atomes de fer (3d 4s2) peuvent être présents aux plusieurs degrés d’oxydationdont les plus courants en chimie minérale sont +2, +3, +4, +5 et +6. Laspectrométrie Mössbauer de 57Fe permet de suivre l’impact du peuplement desorbitales 3d sur la valeur du déplacement isomérique et du champ hyperfinmagnétique.
Elle permet en outre d’étudier la corrélation entre ces deuxparamètres. Une étude théorique avait montré [57] que la diminution du nombred’électrons 3d dans la couche électronique de l’atome du fer (et, par conséquent,l’affaiblissement du blindage des électrons s par les électrons 3d) devait faireaccroître la valeur de la densité électronique au site de noyau |Ψ(0)|2 et fairedécroître la valeur du déplacement isomérique (étant donné le signe négatif durapport de ΔR/<R> pour le 57Fe).110Fig. 60.
Variation des spectres de 57Fe d’un brownmillerite antiferromagnétiqueSrFeO2,5 (TN = 517 K) due à l’introduction des cations Sc3+ et Ga3+. Tmes = 78 K[56]. L’attribution des sextuplets aux sites octaédrique et tétraédrique est indiquée dans le hautde la figure.Cette conclusion a pu être expérimentalement confirmée par les mesuresMössbauer.
Les résultats des calculs Hartree-Fock pour les atomes de fer setrouvant au degré d’oxydation +6 au sein d’un anion FeO 24− ont également suggéré[57] que le peuplement des orbitales 3d dans ce cas devait dépasser la valeurnominale pour la configuration 3d2 tandis que le nombre effectif d’électrons nonappariés devait au contraire être inférieur à 2. La validité de ces prévisionsthéoriques a été confirmée par l’analyse des valeurs du déplacement isomérique etdu champ hyperfin magnétique [58].
La valeur de H = 147 kOeexpérimentalement déterminéé pour K2FeO4 à 0,15 K ( !!!) (Fig. 61) s’est avéréesensiblement inférieure à la valeur de 220 kOe correspondant à la présence de deuxélectrons non appariés, anticipée pour la configuration électronique 3d2. Cettedifférence traduit le transfert de la densité électronique des anions d’oxygène versles orbitales 3d nominalement vides. Ce même effet est à l’origine de la valeurélevée du déplacement isomérique (δ = -0,7 mm/s) par rapport à celle anticipéepour un composé « purement ionique » du fer hexavalent.
Quant aux travauxportant sur d’autres « degrés d’oxydation supérieurs » du fer, ils ont été111Fig. 61. Spectre Mössbauer de K2FeO4 à 0,15 K [58].essentiellement consacrés aux oxydes comportant les « entités » Fe(IV).Considérons tout d’abord les résultats portant sur SrFeO3 obtenus par P.K.Gallagher et al. [58]. Ainsi que pour le ferrate K2FeO4 comportant le ferhexavalent, la valeur du déplacement isomérique dans les spectres de SrFeO3 (Fig.62) s’est avérée supérieure à celle anticipée pour la configuration électronique 3d4.Fig. 62. Spectres Mössbauer de SrFeO3 à diverses températures [59].112A priori la diminution parallèle du rayon ionique devrait entraîner unrenforcement du caractère covalent de la liaison Fe-O.
Toutefois cela peut conduireaussi bien à l’augmentation qu’à la diminution du déplacement isomérique car toutdépend du type des orbitales impliquées (3d ou 4s). Même si la valeur dudéplacement isomérique pour SrFeO3 (Fe4+, configuration 3d4, δ = 0,054 mm/s),est inférieure à celle pour Fe2O3 α (Fe3+, configuration 3d5, δ = 0,38 mm/s), lavariation de δ observée en passant de SrFeO3 à Fe2O3 α est nettement plus faibleque celle associée au passage de Fe2O3 α à FeO (Fe2+, configuration 3d6, δ = 1,06mm/s). Cela signifie que les « effets de covalence » affectent d’avantage desorbitales 3d en augmentant leur peuplement.
Un autre résultat intéressant obtenulors de l’étude de SrFeO3 est l’absence d’interactions quadripolaires aussi biendans le domaine paramagnétique (un singulet à T > TN) que dans le domaineantiferromagnétique (un sextuplet caractérisé à 4,2 K par un décalage quadripolairenul de ses composantes). Ce résultat implique donc une structure perovskiteparfaite de ce ferrate, conclusion déjà faite à partir des résultats d’étudesradiocristallographiques.
Or pour la configuration 3d4 ( t 23g e1g ), comportant unélectron eg localisé, l’octaèdre [FeO6] devrait être distordu par l’effet Jahn-Teller.Par conséquent l’absence d’interaction quadripolaire a permis de supposer quel’électron eg du Fe(IV) se trouvait à l’état délocalisé, en accord avec la conductivitéélectrique du type métallique du ferrate de strontium. Cette conclusion a étéconfirmée de façon originale par l’analyse des spectres des cations dopants 119Sn4+[60].
A 4,2 K le spectre de 119Sn était constitué d’une superposition de plusieurssextuplets traduisant la présence simultanée des cations Fe3+ et Fe5+ dansl’environnement cationique le plus proche des ions dopants Sn4+. L’apparition deces cations de fer a pu être expliquée par un transfert électronique rapide, bloqué àproximité du défaut ponctuel Sn4+. Autrement dit, les spectres de 119Sn ont mis enévidence la « dismutation » locale des cations du fer(IV) selon le schéma: 2 Fe(IV)→ Fe(III) + Fe(V).
Un processus analogue, quoique non localisé, affectant leferrate dans son ensemble a été mis en évidence lors de l’étude des spectres du 57Feau sein de CaFeO3 [61]. Dans ce cas le singulet, observé à 300 K, donc au-dessusde TN = 115 K, a éclaté à basse température en deux composantes sextuplets (Fig.63). Ces sextuplets caractérisés, comme on pouvait s’y attendre d’après le schémade dismutation, par des contributions sensiblement égales, se distinguaientbeaucoup quant aux valeurs de δ et H (à 4,2 K: δI = 0,34 mm/s, HI = 416 kOe; δII= 0,00 mm/s, HII = 279 kOe).
Il est signficatif, que les valeurs moyennes <δI> =0,17 mm/s et <H> = 348 kOe étaient bien en accord avec celles obtenues pour leFe(IV) dans SrFeO3 (δ = 0,146 mm/s, H = 331 kOe).A l’heure actuelle on connaît un très grand nombre de travaux consacrés àl’étude des oxydes comportant simultanément des quantités inégales de Fe(IV) etFe(III).