P.B. Fabritchnyi et K.V. Pokholok - Spectrometrie mossbauer et son application a la caracterisation des materiaux (797054), страница 23
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52. Structure d’un centre d’impureté de Sn2+ au sein de la première couchecationique adjacente à la surface de Cr2O3.Les mesures Mössbauer ont permis de mettre en évidence une particularité trèssignificative: la mise de l’échantillon au contact de l’air ambiant a provoqué lepassage quasi instantané de l’étain à l’état tétravalent (Fig. 53).La rapidité de déroulement de cette réaction d’oxydation démontre bienl’accessibilité particulièrement facile des ions d’étain aux molécules d’oxygène.L’ensemble de tous ces faits, établis grâce aux mesures Mössbauer, permet deconclure que dans l’échantillon concerné les ions Sn2+ ne peuvent être présents qu’à la surface des cristallites de Cr2O3.
C’est bien à la surface qu’ils continuent àêtre polarisés « en spin » par les cations voisins Cr3+ tout en possédant unecoordinance plus basse que dans le cœur de cristallites et c’est notamment à lasurface que la réaction d’oxydation ne nécessite pas de diffusion des moléculesd’oxygène vers les couches profondes de grains.Enfin, la localisation superficielle des ions d’étain a pu être confirmée de façonindépendante par spectrométrie photoélectronique par rayons X (souvent appelée« technique XPS »). L’application de cette technique, qui a rendu possible ladétermination du rapport des teneurs [Sn]/[Cr] dans les couches adjacentes d’uneépaisseur de 2 à 3 nm, a montré que le rapport [Sn]/[Cr] = 0,12.
Cette valeur est 40fois supérieure à celle caractérisant la composition globale de l’échantillon (lerapport des quantités de chrome et d’étain utilisées dans la synthèse R = 0,003).96Fig. 53. Evolution desspectres (représentés à la Fig. 48)après mise de l’échantillon aucontact de l’air ambiant.Enregistrement à 310 K (a) et78 K (b).AbsorptionaHI = 110 kOeHII = 60 kOebVitesse, mm/sCe résultat met donc en évidenceun enrichissement « anormal » decouches superficielles en étain ce qui tout à fait compatible avec la présence dudopant à l’interface.L’origine du déplacement des ions d’étain du cœur vers la surface des cristallitesest liée à l’aptitude des ions Sn2+ à occuper les sites de faible coordinence.
Cesderniers sont énergétiquement défavorables pour le cation Cr3+, dont laconfiguration électronique t 23g le pousse à préserver sa coordination octaédrique.Par conséquent les cations Cr3+, voisins d’un ion d’étain superficiel, stabilisentcelui-ci au degré d’oxydation +2, puisque ses voisins Cr3+ gardent leurs ionsoxygènes qui auraient pu être perdus lors du passage des ions Sn2+ à l’étatmétallique.
Ceci permet d’expliquer la stabilité remarquable des ions Sn2+superficiels lors de recuit sous hydrogène qui préservent leur degré d’oxydation +2même à 1200 K. Un effet analogue d’« enrichissement anormal » de la surface deCr2O3 en cations d’impureté a été mis en évidence lors de recuit sous hydrogènedes échantillons dopés avec 121Sb5+ et 125Te6+ [52].
L’accumulation des ionsd’antimoine et de tellure à la surface des cristallites s’explique par la formation descations « isoélectroniques » Sb3+ et Te4+, possédant, comme ceux Sn2+, une paired’électrons non partagés stéréochimiquement actifs qui leur permet d’occuper lessites à faible coordinence.Les études ultérieures ont permis de mettre en évidence la localisation des ions2+Sn à la surface des cristallites de V2O3, Al2O3 α et de solutions solides Cr2-xAlxO3.Dans le dernier cas, il a été établi que le recuit sous hydrogène provoquaitl’enrichissement de la surface de cristallites non seulement en étain mais, cettefois, également en ions Al3+ qui peuvent aisément s’accommoder, à la différencedes ions Cr3+, à des sites tétraédriques (avec NC < 6).L’aptitude des atomes superficiels à réagir facilement, à l’ambiante, avec diversgaz a permis de suivre, par spectrométrie Mössbauer, le réarrangement ultérieur del’environnement anionique des cations dopants introduits.
Ainsi, ces expériences97ont-elles montré que l’interaction des cations superficiels Sn2+ avec les halogènesne conduisait point à la stabilisation des cations formés Sn4+ dans des sites àenvironnement anionique mixte. Au lieu de se trouver dans un environnementoxyhalogéné les cations oxydés Sn4+ se sont avérés distribués sur des sites de deuxtypes où ils sont entourés uniquement par les anions oxygènes ou bien uniquementpar les anions halogènes. Les ions Sn4+, liés aux anions oxygènes, restent« polarisés en spin », étant toujours présents au sein de la première couchecationique superficielle.
En revanche, les ions Sn4+, entourés par les anionshalogènes, se voient arrachés du support oxygéné (H = 0 kOe à 100 K). Ainsi,grâce à ce réarrangement de l’environnement primaire des ions Sn4+, la réactionchimique avec les molécules de X2, au lieu de conduire à l’insertion dans la surfacede nouveaux défauts (anions X-), au contraire lui permet de se débarrasserpartiellement des atomes d’impuretés qui y étaient déjà présents. Par ailleurs, uneétude de l’interaction des cations superficiels Sn2+ et Sn4+ avec les gaz acides (HClou HF) a permis de mettre en évidence la corrosion chimique de la surface sousaction de ces gaz en atmosphère réductrice et la passivation de la corrosion aprèsexposition préalable des échantillons à l’air.
Parmi les composés supportsmentionnés, permettant de localiser les éléments 5s5p à la surface de leurscristallites, l’oxyde de chrome présente un intérêt particulier grâce à son activitécatalytique dans de très nombreuses réactions chimiques. Dans ce cas les spectresMössbauer de 119Sn, 121Sb et de 125Te deviennent une source d’informations sur lemécanisme d’impact modificateur associé aux additives d’éléments concernés.Le développement des travaux sur l’application des cations sondes Mössbauer àl’étude de la surface nécessite la recherche d’autres composés supports appropriésà cette fin.98Conférence 12Application de la spectrométrie Mössbauer à l’étude des composésfinement divisésLes composés finement divisés (qui sont « amorphes » aux rayons X), d’unepart, et ceux se trouvant à l’état cristallin, d’autre part, peuvent avoir la mêmecomposition chimique mais se distinguer néanmoins par leur caractéristiquesspectrales.
Cela est dû aussi bien à la teneur relative différente en atomessuperficiels, possédant un environnement local spécifique, qu’aux propriétésparticulières d’un « nano-matériau » dans son ensemble.Probabilité de transitions sans recul (valeur du facteur f).En abordant l’application de l’effet Mössbauer à l’étude des systèmes finementdivisés, comportant les particules dont le diamètre est de l’ordre de quelquesnanomètres, il serait logique de se poser la question suivante : « Les transitionssans recul peuvent-elles en fait être observées dans de telles particules ? ».Effectivement, même si l’énergie de recul associée à l’émission d’un rayon gammaest consommée lors de l’excitation collective de l’ensemble des atomes d’unenanoparticule, la masse de cette dernière peut s’avérer insuffisante pour que l’effetde recul puisse être considéré comme négligeable par rapport à la largeur naturelle.Dans ce cas, pour ajuster l’énergie du rayon gamma à la résonance, il seranécessaire de compenser la perte d’énergie due au recul de la nanoparticule touteentière.
Cela nécessiterait des vitesses de Doppler incomparablement plus grandesque celles habituellement utilisées dans les expériences Mössbauer. Toutefois,l’effet de recul dans les nanoparticules individuelles n’a jamais pu êtreexpérimentalement observé en raison de l’existence des liaisons chimiques entreles atomes se trouvant à la surface des particules voisines.
Ces liaisons s’avèrentsuffisantes pour qu’un nombre d’atomes beaucoup plus grand que celui renfermédans une nanoparticule (dans un cristallite) isolée soit engagé dans la dissipation del’énergie de recul. Cette conclusion est confirmée par les résultats d’une étudeMössbauer des particules d’or finement divisées qui étaient incorporées dans lagélatine [53]. Les spectres de 197Au ont mis en évidence (i) l’absence des pics à desvitesses « anormalement grandes » et (ii) l’intensité accrue du pic d’absorptionrésonnante « normale » (c’est-à-dire l’augmentation du facteur f) dans lesparticules de diamètre égal à 6 nm par rapport à l’intensité du pic observé pour desparticules de 20 nm de diamètre. Ainsi, même les plus petites particules n’ont pasnécessité une compensation d’énergie supplémentaire pour rendre possiblel’absorption résonnante.
A première vue, l’augmentation de la valeur du facteur fpour les petites particules paraît assez surprenante et justifie donc un commentaireparticulier. Cet effet a été attribué au fait que la répartition des longueurs d’ondesdes oscillations thermiques dans le cas d’une nanoparticule est exempte delongueurs d’ondes dépassant la taille de celle-ci. Par conséquent, la diminution de99la contribution des phonons à grandes longueurs d’ondes (ou de basses énergies),les plus facilement excitables lors des transitions non-résonnantes, fait accroître latempérature de Debye effective au fur et à mesure de la diminution de la taille desparticules.Toutefois, dans la grande majorité des cas, l’augmentation du degré dedispersion conduit à la diminution de l’intensité de l’absorption résonnante.